L’eugénisme en Europe


C’est seulement à la fin du XIXème siècle qu’il y eut une véritable théorisation de l’eugénisme. C’est à cette époque, en 1883, que le mot eugenics fut inventé et définis par Francis Galton, à partir du grec, (bien) et génos (naissance) qui signifie « bien né ». Étymologiquement, l’eugénisme (ou eugénique) se voulait donc la « science des bonnes naissances », l’idéologie eugéniste entend donc favoriser ces bonnes naissances. Jusque-là, la volonté d’améliorer l’espèce humaine n’était pas traitée comme une science. Mais, à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, divers partie de la médecine sont d’accord en un sens : celui de la dégénérescence et de la nécessité d’améliorer l’espèce humaine. L’eugénisme apparaît comme la solution. L’eugénisme devient un sujet de débat au sein des sphères médicales européennes, tandis que certains États adoptent une législation eugéniste. L’Allemagne nazie pousse à l’extrême l’idéologie eugéniste, professant un eugénisme négatif passant par la stérilisation forcée et l’euthanasie des individus « indésirables ». Synonyme des crimes nazis, l’eugénisme est resté tabou jusqu’à la fin du XXème siècle. La question, n’est pas seulement d’ordre scientifique. Les idées eugénistes remontent à l’Antiquité, où elles furent parfois appliquées (ainsi en Grèce, et plus spécialement à Sparte, où l’on abandonnait à la mort les nouveau-nés anormaux). Les idées eugénistes ne disparaissent jamais complètement, resurgissant à diverses époques sous différentes formes, mais sans avoir d’applications, sinon très marginales.

Dans l’Antiquité on trouve des trace de l’eugénisme, dans la République (livre V), Platon écrit : « Il faut, selon nos principes, rendre les rapports très fréquents entre les hommes et les femmes d’élite, et très rares, au contraire, entre les sujets inférieurs de l’un et de l’autre sexe », alors que le terme n’existe pas encore l’idée de l’eugénisme est présente. En 1655, la Callipédie du médecin français Claude Quillet présente les règles à respecter pour avoir une bonne progéniture : l’ouvrage rencontre un franc succès. En 1756, le médecin français Charles-Augustin Vandermonde publie un Essai sur la manière de perfectionner l’espèce humaine pour identifier « toutes les qualités requises dans les deux sexes, pour avoir des enfants aussi parfaits qu’on peut le désirer », à l’idée de faire de beaux enfants s’ajoute celle de perfectionner l’espèce humaine, c’est en 1862, que Charles Darwin, donne sa définition de la sélection naturelle dans son ouvrage De l’origine des espèces : « Les hommes sont inégaux par nature : voilà le point d’où il faut partir », écrit sur la préface. Par la suite, c’est le philosophe anglais Herbert Spencer, analyse quant à lui la sélection naturelle comme « la sélection des plus aptes ». Ce qui va donner naissance au darwinisme social, qui justifie que les êtres « supérieur » survivent tandis que les êtres « inférieurs » disparaîtront. Au même moment se développe en médecine le concept de « dégénérescence » : si l’état de la population et les situations d’hygiène ne changent pas, une future extinction humaine devient inéluctable. Les maladies infectieuses (tuberculose et syphilis), les troubles sociaux (alcoolisme et criminalité) et les maladies mentales donnent corps à ces théories. Quant à elle la psychiatrie établit un lien direct entre la folie, la dégénérescence et le désordre social, mettant le malade mental, ainsi que les prostituées, dans la ligne de mire des eugénistes.

Après la définition en 1883 de Galton, cousin de Darwin, défini en tant que ; « Science de l’amélioration de la race, qui ne se borne nullement aux questions d’unions judicieuses, mais qui, particulièrement dans le cas de l’homme, s’occupe de toutes les influences susceptibles de donner aux races les mieux douées un plus grand nombre de chances de prévaloir sur les races les moins bonnes », cette théorie va se vêtir d’un caractère double : « positif », parce qu’il va  favoriser les bonnes unions dont les enfants, seront de bonne qualité ; « négatif », parce qu’il limite la reproduction des individus jugés inaptes. Les eugénistes présente l’eugénisme comme une religion en Europe et dans le monde pour pouvoir l’imposer selon Galton l’eugénisme est « laïque, substitut scientifique aux religions officielles ». La seule loi d’inspiration eugéniste mise en place en France relève donc d’un eugénisme négatif modéré. Promulguée en 1942, sous le régime de Vichy.

Inspiré par les idées qui circulent en Europe et aux États-Unis, Hitler développe une idéologie eugéniste radicale, raciste et suprémaciste, la « race aryenne » qui tire également ses sources de l’antiquité. L’élimination des êtres et des peuples inférieurs, dont ; juifs, handicapés (mentale et physique), homosexuels, et Tziganes. En 1936 est lancé le Lebensborn, un programme destiné à favoriser la naissance d’enfants aryens. En cela, en 1945, l’eugénisme devient tabou. L’eugénisme ceci dit, appartient à tous les courants politiques. Les seules oppositions institutionnelles qu’il rencontra ont été celles de l’Église catholique (encyclique Casti connubii de Pie XI en 1930) et de l’U.R.S.S. Partout ailleurs, du fascisme au marxisme en passant par la social-démocratie, l’eugénisme a eu ses partisans.

Bibliographie :

André PICHOT et Jacques TESTART. Eugénisme, Encyclopædia Universalis. [en ligne] : https://www-universalis-edu-com.ezproxy.uphf.fr/encyclopedie/eugenisme/

Charlotte Chaulin , « L’eugénisme en Europe (19e siècle-20e siècle) », Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe [en ligne] https://ehne.fr/fr/node/12517

Pour plus de détails :

Daniel Teysseire, Simone Bonnafous (dir.), Pierre André Taguieff, « L’introduction de l’eugénisme en France : du mot à l’idée»,   Mots, n°26, mars 1991. Médecine, santé et politique, pp. 23-45.