Maladies vénérienne, mal vénérien ou encore péril vénérien, sont la peur du XIXème siècle en ce qui concerne la prostitution. En effet elle est apparue brutalement en Europe en 1494, et on pense généralement qu’elle a été importée par Christophe Colomb et ses équipages depuis le continent américain, où elle devait exister sous une forme différente (tréponématoses endémiques, non vénériennes). La syphilis, due à Treponema pallidum (identifié en 1905 par Schaudinn et Hoffmann) était jusqu’à la découverte de la pénicilline en 1943 une maladie très grave, et contrairement aux autres maladies vénériennes il s’agit d’une maladie générale. La syphilis, maladie la plus courante contient 3 étapes de la syphilis : primaire, secondaire, et tertiaire :
- La syphilis primaire consiste en un chancre. Ce chancre peut ressembler au chancre mou, mais en général il est bien différent : il apparaît environ trois semaines après le contact infectant (pour le chancre mou, l’incubation n’est que de quelques jours) ; il est discret, simple érosion de la muqueuse ou de la peau, et suppure rarement. A la palpation, il est induré, et non pas mou. Les ganglions régionaux peuvent être augmentés de volume, mais ils ne suppurent pas. Le chancre syphilitique guérit spontanément. Ce qui veut dire que si un traitement a été administré, on ne peut pas savoir si la guérison du chancre est due à ce traitement, ou à son évolution spontanée.
- La syphilis secondaire survient quelques semaines ou mois après le chancre, qui a donc à ce moment disparu. Sa manifestation essentielle est une éruption de lésions cutanées d’aspect variable. On a appelé la syphilis « la grande simulatrice » parce que cette éruption peut ressembler à d’autres maladies de peau. Des compétences en dermatologie sont donc nécessaires pour porter le diagnostic de syphilis secondaire, ce qui explique le lien historique entre la dermatologie et les maladies vénériennes. La syphilis secondaire comporte aussi d’autres manifestations : adénopathies, hépatite, méningite, … mais ici aussi tout finit par guérir spontanément.
- La syphilis tertiaire est une atteinte tardive de nombreux organes : peau, os, cœur, aorte, système nerveux central. Ces atteintes peuvent être graves, source d’infirmités, voir mortelles.
Elle se transmet habituellement au cours des relations sexuelles (dont les contacts génitaux, bucco-génitaux et anorectaux) mais peut se transmettre sans rapports sexuels par contact de la peau ou par voie transplacentaire. En ce qui concerne la syphilis on trouve aussi ; les syphilides, Une syphilide est l’une des lésions cutanées et muqueuses caractéristiques de la syphilis secondaire et tertiaire. Les syphilides, on les reconnait car elles sont papuleuses (Les papules, sont des petites excroissances sèches de la peau, sont une lésion dermatologique courante. Elles se manifestent sous forme de boutons, sans contenu liquide, et peuvent apparaître partout sur le corps), de couleur rouge cuivré, souvent cerclées par une collerette de Biett (Desquamation ; la desquamation désigne la perte des couches superficielles de l’épiderme) périphérique observée autour de certaines lésions cutanées de la syphilis secondaire. L. Biett, dermatologiste français d’origine helvétique, membre de l’Académie de médecine (1781-1840). Pour la syphilis gommeuse, cela va se caractériser par une manifestations constituée de lésions rouges et pustuleuses, épaisses et recouvertes de croûtes rappelant le psoriasis (cutanéo-muqueuses) : les gommes, qui sont des indurations (= Durcissement d’un tissu organique peau etc.) infiltrées, initialement fermes puis qui se ramollissent et s’ulcèrent. Puis, on peut également trouver dans ces différentes maladies, les chancres syphilitiques : se trouve dans une syphilis primaires, ils forment Une plaie ronde, indolore, généralement dure (chancre) qui apparaît sur les organes génitaux, au niveau de l’anus ou ailleurs. On le définit également par une érosion ou ulcération cutanée ou muqueuse qui constitue la porte d’entrée de certaines maladies infectieuses.
Il est possible d’observer dans certaines sources, comme celle des archives de Valenciennes des prostituées touchées par la Gonococcie qui est infection sexuellement transmissible (IST). Gonococcie est le terme générique pour les infections à gonocoque. On parle de Gonorrhée (Elle se transmet habituellement lors de rapports sexuels vaginaux, oraux et anaux). Chez l’homme elle se caractérise par exemple d’un écoulement purulent au niveau du pénis ou du rectum, chez la femme on trouve par exemple des difficultés à uriner, ou des pertes vaginales purulentes. On trouve également la vaginite ou vulvo-vaginite est une maladie que l’on trouve également dans les archives de Valenciennes, c’est une inflammation du vagin résultant : soit d’une infection vaginale due à un champignon (mycose vaginale), une bactérie, un virus ou un parasite ; soit d’une irritation non infectieuse du vagin.
Les images des maladies de la peau telle que la syphilis, la gonorrhée, ou encore le chancre sont des outils d’enseignement, des supports pédagogiques important pour l’apprentissage et le diagnostic, mais aussi pour la lutte contre le péril vénérien. Par conséquent la création dans les années 1860 d’un musée de dermatologie à l’hôpital Saint-Louis, lieu de naissance de la dermatologie hospitalière en France, va concrétiser l’intérêt des dermatologues pour l’image en tant qu’outil d’enseignement des maladies de la peau. D’abord constitué d’aquarelles, le musée poursuit avec de la photographies et surtout des moulages en cire reproduisant plus fidèlement la morphologie des maladies. La peur produite par les conséquences de la syphilis et par la mortalité infantile liée à la transmission considérée comme héréditaire de la maladie (Dr. Edmond Fournier), va justifier la production de plusieurs centaines de moulages à la syphilis, permettant aux médecins d’apprendre à la reconnaître dans ses multiples formes cliniques.
Le fondateur de à l’hôpital Saint-Louis de la dermatologie hospitalière en 1801, Jean‑Louis Alibert, insiste sur l’importance des études sur les maladies de la peau pour connaître la syphilis, les successeurs d’Alibert ont été nommés dermato-syphiligraphes et la création en 1879 à la faculté de médecine de Paris d’une chaire de clinique unissant l’enseignement de la dermatologie et des « maladies syphilitiques » va officialiser cette situation. Alfred Fournier fut nommé le 31 décembre 1879 premier titulaire de la chaire de clinique des maladies cutanées et syphilitiques à la faculté de médecine de Paris.
Le musée crée à l’hôpital Saint-Louis à la fin du XIXème siècle pour exposer des moulages en cire des maladies de la peau illustre ces liens de la dermatologie et de la syphilis : un peu plus de 1 200 moulages, soit un quart de la collection, sont consacrés aux formes cliniques de la syphilis. Une création d’encyclopédie visuelle pour montrer l’importance de cette place des maladies dans l’activité des dermatologues. Avec un réalisme paraissant idéal pour apprendre à reconnaître la syphilis sous toutes ses formes. Les pièces exposées au musée de Saint-Louis sont cataloguées en quatre sous-collections :
- La collection générale (la plus importante) rassemble des moulages consacrés aux maladies de la peau et à la syphilis ;
- La collection Fournier est consacrée aux maladies sexuellement transmises ;
- La collection Péan comprend des moulages de pièces chirurgicales ;
- La collection Parrot contient des moulages de syphilis dite héréditaire et quelques moulages de vaccine de l’enfant.
Quelques exemples d’images des maladies dermatologiques (que l’on retrouve également dans les archives de Valenciennes sur les prostituées) :
Fournier, 1885
Bibliographie :
Ardagna, Yann, et Benoît Pouget, La syphilis. Itinéraire croisés en Méditerranée et au-delà, XVIème-XXIème siècle. Presses universitaires de Provence, 2021.
Pour plus de détail :
Le manuel MSD en ligne : https://www.msdmanuals.com/fr/professional/maladies-infectieuses/infections-sexuellement-transmissibles/syphilis
Daniel Wallach et Gérard Tilles, Le traitement de la syphilis par le mercure. Une histoire thérapeutique exemplaire, 1996
Daniel Wallach et Gérard Tilles, Histoire du traitement de la syphilis par le mercure : 5 siècles d’incertitudes et de toxicité, Revue d’histoire de la pharmacie, 84ᵉ année, n°312, 1996. Actes du XXXIe Congrès International d’Histoire de la Pharmacie (Paris, 25-29 septembre 1995) pp. 347-351.
Edmond Fournier, Recherche sur l’hérédosyphilis tardive, 1907.
Henri Bütterlin, Les injections mercurielles dans le traitement de la syphilis, 1909.
Iconographie :
Bibliothèque de l’université Parais-Saclay : https://numerabilis.u-paris.fr/medica/banque-images/index.php?refphot=STLCFO00003